De Sahar Mechri, correspondante à Sousse – Les entreprises tunisiennes sont à l’honneur à l’occasion des Journées de l’entreprise 2022 organisées par l’Institut arabe des chefs d’entreprise. Lors d’un panel datant du vendredi 9 décembre, Noureddine Hajji, Managing Partner EY Tunisie, intervient dans ce 2e panel des JES2022 sur le thème “Nouvelles contraintes, nouvelles stratégies de l’entreprise”.
Un décalage entre l’intention et la réalisation
Les intentions, même en étant les meilleures du monde, ne sont pas en adéquation avec les réalisations sur le terrain. “Il y a de l’optimisme dans les intentions du gouvernement, mais finalement peu de réalisations sur le terrain”, affirme Hajji. Le secteur privé souffre de fortes inquiétudes et d’un certain pessimisme. L’entreprise tunisienne fait face à des enjeux et des défis de taille par rapport à un marché mondial en plein bouleversement.
L’oppression du contexte général
“L’entreprise tunisienne est déjà opprimée, entre un contexte économique et un contexte politique peu favorables. Pourtant, l’entreprise tunisienne nous a agréablement étonnés par sa capacité de résilience”, déclare Hajji. De fait, il encourage les réussites des entreprises privées tunisiennes, qui sont parvenues à croître malgré tous ces obstacles. “Certaines entreprises ont fait mieux que résister. Elles ont réalisé une belle croissance et ont servi les marchés extérieurs”.
Cependant, la nuance est de mise. “Cette proportion des entreprises qui performent a diminué sensiblement depuis 2011. Tout au plus, 25% des entreprises font de la croissance. Cela signifie que la majorité de nos entreprises sont en souffrance”. Hajji lie cela à l’historique du pays. “Avec l’héritage des 10 dernières années, les entreprises vont faire face à ce que leur impose la géopolitique. De facto, la crise Covid, avec ses conséquences telles que la guerre russo-ukrainienne, entraîne une contraction de la demande des entreprises”.
Une chute du dinar tunisien multi-impact
Hajji met en perspective la chute du dinar tunisien avec une inflation globale tant au niveau des matières premières que des produits finis. “D’autres facteurs qui concernent la plupart des entreprises (matière première, énergie, coût du travail) sont touchés par la conjoncture économique. Il y a également le spectre d’une dépréciation du dinar qui va fortement impacter les entreprises fortement exposées sur le marché local ou faiblement exportatrices”.
La résilience est la clé pour surmonter les obstacles
Certaines mesures, comme l’activation des mécanismes fiscaux, sont envisagées dans la loi de finances 2023 et risquent de peser lourdement sur les entreprises. Sans compter les impératifs du changement climatique, de la transition vers un écosystème neutre en carbone, auquel les entreprises tunisiennes sont peu préparées. D’après Hajji, ces difficultés ne sont pas propres aux entreprises tunisiennes, et c’est pour cela qu’il faut “activer les leviers de soutien des entreprises”. Cela motive celles qui sont en difficulté: “Nos entreprises vont devoir se débrouiller toutes seules et activer la résilience qu’elles ont apprise. Je crois qu’elles en sont capables”.
Un avenir différent
D’ailleurs, EY a publié récemment une étude qui traite du monde nouveau dans lequel nous allons vivre. Hajji détaille les résultats: “La globalisation des années 2000, façon full globalisation, est révolue. La future mondialisation sera light, avec davantage de mobilité des entreprises. Dans l’étude, 39% ont décidé de délocaliser leur actif et 95% ont dit qu’ils vont porter des changements. 30% d’entre eux quittent certains marchés. 40% vont reconsidérer leur chaîne de valeur”. Il conclut par la nécessité de tirer profit de l’axe Europe-Afrique.