La Route transsaharienne est, depuis les années ‘60, un projet de grande envergure pour le continent africain. Le projet est abordé à plusieurs reprises lors des Tunisia Africa Business Meetings organisés mardi 6 décembre, notamment lors du live d’Express FM. Il relie six pays du continent africain (Algérie, Mali, Niger, Nigeria, Tchad, Tunisie) par voie terrestre. L’objectif est de dynamiser l’activité économique de la région et de faciliter la mobilité des hommes et des marchandises.
Qu’est-ce que le corridor RTS?
Une étude intitulée “Le corridor de la route transsaharienne”, publiée par la Cnuced en octobre 2022, synthétise le projet et présente l’état des lieux actualisé. “Le corridor RTS est l’un des plus anciens corridors routiers transnationaux d’Afrique et aussi l’un des plus complets: il a été proposé en 1962 et la construction de certaines de ses sections sahariennes a démarré dès les années 1970. Le corridor RTS relie l’Algérie, le Mali, le Niger, le Nigeria, le Tchad et la Tunisie (trois pays portuaires et trois pays sans littoral). Doté d’une colonne vertébrale (axe principal) nord-sud longue de 4 500 km, le corridor relie les ports d’Alger et de Lagos en traversant l’Algérie, le Niger et le Nigeria. Un réseau de 4 600 km de routes secondaires desservant la Tunisie, le Mali, Niamey (au Niger) et le Tchad est considéré comme une partie intégrante du corridor routier transsaharien. Le corridor RTS est goudronné (asphalté) à près de 80%. La branche tunisienne dessert les ports de Tunis et de Gabès”.
Et qu’en est-il de cette route en 2022?
Le trafic (2019) sur le principal axe nord-sud est important sur les tronçons situés en Algérie et au Nigeria, avec une part de trafic lourd (camions) de 15% en Algérie et de 35% au Nigeria. Sur les sections de raccordement à l’axe principal, le trafic est très faible, hormis en Tunisie où la circulation entre Gabès et la frontière algérienne puis Ghardaïa (en Algérie, sur le principal axe RTS) est plus dense que sur d’autres sections de raccordement, mais bien plus faible que sur les principales sections en Algérie et au Nigeria.
Des problèmes majeurs restent à résoudre au niveau des deux principales portes d’entrée du grand axe nord-sud du corridor RTS, soit le port d’Alger et le port de Lagos. Malgré ses récentes améliorations (datant d’avant 2020), le port d’Alger reste engorgé et des surtaxes de congestion sont régulièrement appliquées par les compagnies de transport maritime. Les retards sont courants et les temps d’attente au port restent importants. Plusieurs facteurs critiques minent également l’efficacité du port de Lagos. Parmi les problèmes répertoriés figurent des déficits d’infrastructures de transport, des carences au niveau des services et des installations des agences gouvernementales, et une insuffisance des services proposés par les opérateurs du secteur privé présents dans le port. Le port de Gabès (comme celui de Radès) semble prêt à jouer un rôle clé comme porte d’entrée du corridor RTS, mais aurait besoin d’investissements dans un terminal à conteneurs.
En sus des problèmes bien connus de sécurité dans la région du Sahel, les difficultés observées aux différents postes-frontières du corridor RTS sont dues à une interprétation étroite et excessivement rigoureuse de la réglementation, qui entraîne problèmes et contretemps. Il n’existe aux postes-frontières aucune utilisation des TIC pour le partage d’informations, et aucune réelle gestion des risques n’y est appliquée. Le fait que l’Algérie ne fait pas partie de la convention relative au transport international routier (TIR) – le pays en a suspendu l’application en 1991 – n’arrange pas les choses.
Ports secs et dépôts terrestres de conteneurs se développent lentement dans les pays de la RTS. Plusieurs dépôts de conteneurs situés à l’intérieur des terres sont sous gestion privée au Tchad, au Niger et au Mali. Les opérateurs privés ont également investi dans la construction et le développement d’entrepôts fermés et sécurisés ainsi que dans des entrepôts sous douane. Ces initiatives ne sont toutefois pas mises en œuvre dans tous les pays RTS.
Les aspects généraux de protection de l’environnement ne reçoivent pas l’attention adéquate. Les politiques visant à promouvoir la croissance économique devraient tenir compte de l’épuisement dans le temps des ressources non renouvelables, de l’impact de l’activité économique sur l’environnement, du changement climatique, et de la nécessité de protéger la biodiversité et de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Des politiques durables au niveau environnemental sont essentielles pour assurer une croissance pérenne au niveau économique en général, et pour limiter les externalités telles que la pollution de l’air, les émissions de gaz à effet de serre et les facteurs contribuant au changement climatique.