Le terme de porteur de projet est souvent utilisé dans l’écosystème des startups, l’on pourrait même dire galvaudé. Pourtant, lorsque Dhekra Khelifi, partner au VC 216 Capital, l’utilise, c’est dans un sens bien précis. A la question du profil idéal du startuppeur/de la startuppeuse, elle répond de plusieurs façons différentes.
Pas de compétences ou de diplômes requis
Le profil idéal n’a pas de compétences ou de diplômes précis, selon Dhekra Khelifi. Il ne s’agit pas d’une offre d’emploi, mais d’un investissement dans un projet. “Le profil idéal consiste en une personne qui peut porter et qui est sûre de porter un projet. Cela signifie qu’elle a déjà eu une expérience dans cette industrie-là. Idéalement, elle aurait fait un bout de chemin dans le domaine et connaît la question entrepreneuriale. Une expérience dans un business, réussie ou pas, est appréciée.” Contrairement à des environnements beaucoup plus compétitifs, comme la Silicon Valley, l’accès au financement en Tunisie reste assez accessible.
Un(e) entrepreneur(e) ayant bien fait ses recherches
L’autre point crucial de l’investissement est de voir que l’entrepreneur(e) a effectué des recherches sur le fonds d’investissement. La personne s’est dirigée vers ce fonds en connaissance de cause, en le sélectionnant parce qu’il correspond à son projet. Dhekra Khelifi ajoute: “Nous choisissons des startups. Nous voulons aussi qu’il y ait une culture où l’entrepreneur choisit son investisseur. Nous sommes dans un marché où la demande est supérieure à l’offre. Bientôt, il y aura un marché plus compétitif avec une panoplie d’investisseurs. Dans un programme comme TAW (Tech African Women) qui encourage les business portés par des femmes, les femmes entrepreneures doivent sélectionner leurs investisseurs”.
Et les femmes entrepreneures ?
Dans le cas des femmes entrepreneures, elles doivent être particulièrement sélectives par rapport aux fonds. En effet, certains fonds sont plus sensibles à la question de l’impact et du genre. Ils sont donc plus susceptibles de les soutenir. D’après Dhekra Khelifi: “Lorsqu’elles disent qu’elles ne sont pas sélectionnées, que seulement 2% du volume du VC va aux femmes, il faut faire sa recherche. Il faut voir les investisseurs qui sont les plus sensibles à des thématiques comme l’impact ou d’autres thématiques similaires”.
Les tendances, critère de choix ou pas ?
Une orientation de la startup vers un marché plus global est essentielle. La taille du marché visé, plus grand, permet de dépasser le marché tunisien, réduit, et d’accéder à plus de cibles potentielles. Selon Dhekra Khelifi: “Pour les startups, il faut avoir une vision beaucoup plus globale. La vision et l’action plan doivent être un minimum précis: comment l’entreprise va grandir, comment scaler (échelonner) le business…”.
Les modes existent tant dans l’industrie textile que les startups. En 2020-2021, la Covid a propulsé les startups health tech. En 2022, c’est plutôt la cryptomonnaie qui est privilégiée. Dhekra Khelifi explique que les modes sont éphémères, mais les besoins du marché sont plus stables dans le temps. Donc les VC privilégient la taille du marché aux tendances. “Les tendances et les industries vont et viennent. En ce moment, les tendances sont plutôt aux NFT dans le reste du monde. Il faut regarder le marché où l’on souhaite opérer. Il n’y a pas d’industrie que l’on privilégie en tant qu’investisseur. Nous étudions plutôt le potentiel du marché”.
Développer et implanter l’esprit entrepreneurial
L’esprit entrepreneurial est, selon elle, implanté récemment dans la culture tunisienne. “Il faut sensibiliser à la culture entrepreneuriale, afin de faire naître de nouvelles vocations. Ce sont les jeunes, avec leurs idées innovantes et leurs startups, qui ont déclenché cette vague de nouveaux projets. Mais l’entrepreneuriat ne se réduit pas aux startups technologiques”.