Le 19 mai, Électricité de France (EDF, Baa1 négatif) a réduit son estimation de la production nucléaire française pour 2022 à 280-300TWh, soit 15 TWh de moins que sa précédente prévision de février. C’est ce qui est paru dans Moody’s vendredi dernier.
Cette réduction est due à des arrêts programmés prolongés de réacteurs pour lesquels un programme d’inspection en cours a confirmé des défauts de corrosion. EDF a déclaré qu’il n’était pas nécessaire à ce stade de programmer d’autres arrêts pour 2022. La compagnie a confirmé sa précédente estimation de la production nucléaire pour 2023 dans une fourchette de 300 à 330 TWh.
Si elle se réalise, cette dernière réduction de la production nucléaire pèsera davantage sur les résultats du groupe. EDF vend à terme sa production nucléaire estimée avant la fin de l’année budgétaire et, avec un parc dominé par le nucléaire et l’hydraulique, il y a peu de possibilités de remplacer la production perdue. EDF devra racheter l’électricité vendue alors que les prix de l’électricité en Europe restent élevés et volatils. La perte de production nucléaire aggrave la situation en France.
À titre d’illustration, un déficit de 15 TWh entraînera des coûts supplémentaires d’environ 4,2 milliards d’euros, en supposant que le prix couvert par EDF en 2022 soit d’environ 62-65 euros/MWh et que le prix de gros actuel soit d’environ 1 milliard d’euros, correspondant à environ 280 €/MWh. En l’absence de mesures d’atténuation supplémentaires, la perte de production pèsera sur la flexibilité financière du groupe et affaiblira davantage un profil de crédit affecté par l’apparente imprévisibilité de la production nucléaire en France.
Depuis le début de l’année, EDF a révisé à trois reprises ses prévisions de production nucléaire française pour 2022. Le 13 janvier, elle a estimé qu’une production de 300 à 330 TWh, contre 330 à 360 TWh auparavant. Le 7 février, elle a encore abaissé cette estimation à 295-315 TWh. Quatre jours plus tard, le groupe a fortement réduit son estimation de production pour 2023 à 300-330 TWh contre 340-370 TWh.
Le risque qu’EDF révise à nouveau ses estimations pour 2022, 2023 ou les deux semble élevé. Le groupe doit encore terminer un audit métallurgique motivé par la détection de défauts de corrosion dans les réacteurs fin 2021, et doit encore recevoir l’approbation de l’Autorité de sûreté nucléaire française pour son programme de réparation prévu. En outre, le bilan d’EDF concernant la disponibilité de son parc nucléaire français est négatif, comme en témoigne le déclin structurel de la production nucléaire française au cours des 10 dernières années.
Depuis décembre 2021, EDF a détecté des défauts de corrosion à proximité des soudures sur des tuyauteries du circuit du système d’injection de sécurité sur ses réacteurs nucléaires de 1 450 et 1 300 MW. Depuis, elle a procédé à des contrôles et évaluations préventifs sur le reste de son parc, qui sont en cours. L’inspection de l’ensemble du parc devrait se prolonger jusqu’en 2023.
Avec un EBITDA déclaré de 18 milliards d’euros au 31 décembre 2021 et une capacité de production nette installée de 123 GW à la même date, EDF est l’un des plus grands services publics intégrés d’Europe, fournissant des services de production, de distribution et de fourniture d’électricité.
En France, le groupe est organisé autour de deux métiers: Production et Fourniture, où il est le producteur et fournisseur d’électricité dominant, et régulé, qui comprend principalement la distribution d’électricité à travers sa filiale Enedis.