L’inflation déjà galopante ne compte pas s’arrêter de sitôt en région MENA, et particulièrement en Tunisie. Les prévisions de la Banque mondiale estiment l’inflation annuelle à 6,5% pour les années 2022 et 2023.
Lors d’un webinaire organisé par la Banque mondiale jeudi, Paul Salem, Ferid Belhaj et Roberta Gatti ont discuté des problématiques rencontrées dans la région MENA et des prévisions possibles pour les années à venir. Ce webinaire s’inscrit dans le cadre de la publication du nouveau rapport de la Banque mondiale intitulé: “Confrontation avec la réalité: prévisions de croissance dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord en période d’incertitude”.
Paul Salem, président du Middle East Institute, explique que les développements en Ukraine et dans les environs créent une tension et une incertitude autour de l’alimentation et de l’énergie. Il est urgent de décrypter le défi alimentaire immédiatement. La Banque mondiale est l’un des acteurs principaux pour maintenir l’équilibre dans la région.
Roberta Gatti : dans la région MENA, 11 pays sur 17 risquent de ne pas retrouver leur niveau pré-pandémie d’ici fin 2022
Pour Roberta Gatti, économiste en chef pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), les prévisions de cette région tendent à être trop optimistes par rapport à la réalité. Même si le taux de croissance prévu est de 5.2%, il est possible que la croissance effective ne soit pas celle prévue: d’après les estimations de la Banque mondiale, 11 pays de la région sur 17 ne retrouveront pas leur niveau pré-pandémie d’ici fin 2022.
Avant la guerre russo-ukrainienne, les prix de l’énergie et du blé commençaient déjà à augmenter. Depuis le début de la guerre, les prix normalisés du baril de Brent et du blé ont augmenté de jour en jour. D’après le graphique publié dans le rapport, le 23 février, soit un jour avant l’invasion, les prix sont normalisés à 1. Entre le 4 et le 8 mars, le Brent a atteint 1.3 et le blé 1.5. Ils ont ensuite baissé à nouveau pour atteindre le 16 mars 1.0 pour le Brent et 1.3 pour le blé.
En ce qui concerne la balance import-export, les pays MENA sont généralement des importateurs nets de denrées alimentaires et beaucoup sont de gros exportateurs nets de combustibles. Les pays sont divisés en trois groupes: les importateurs de pétrole, les exportateurs de pétrole et les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG). Un pays comme le Liban est particulièrement touché puisqu’il importe 12,7% de son PIB en combustibles et 4.5% du PIB en produits alimentaires. La Tunisie, quant à elle, a 6,6% du PIB en importation nette de combustibles et 1,6% d’importation nette de produits alimentaires.
L’inflation prévue durant les années à venir va peser lourd sur le pouvoir d’achat des plus démunis, pour qui la part du budget consacrée à l’alimentation et au transport est la plus élevée. Déjà, les prix ont augmenté de 20% dans certains pays entre 2020 et 2022, tels que l’Egypte, le Yémen ou Djibouti. L’inflation risque de se poursuivre encore: pour la Tunisie,
les prévisions pour 2022 et 2023 sont de 6.5% d’inflation annuelle pour les deux années.
Enfin, Gatti félicite la Tunisie pour la fiabilité et la transparence de ses données. Même si certaines études pourraient être plus fréquentes, c’est grâce à cette transparence que les prévisions pourront être précises et les plans de développement adaptés en conséquence.