L’entrepreneuriat est un état d’esprit qui se crée dès le plus jeune âge. En Tunisie, la culture est autre : il vaut mieux bosser chez l’Etat qui paie un peu moins par rapport au secteur privé, mais qui offre le luxe de l’absence de risque. Les contestations actuelles contre la non-application de la Loi 38 de 2020 en est la meilleure illustration.
On préfère bosser 10 ans sans statut et dans l’économie souterraine pour décrocher un poste étatique, plutôt que commencer une autre expérience dans le privé ou pour son propre compte.
Certes, il y a d’autres aspects qui ont contribué à cette situation. Il y a tout un contexte qui n’encourage pas à l’investissement, à commencer par l’absence de financement. Ces dernières années, des initiatives lancées par plusieurs incubateurs et organisations étrangères ont vu le jour, offrant un capital de départ et un accompagnement pour les idées innovantes. Toutefois, cela reste loin d’être suffisant. L’absence du financement bancaire, capable de financer le BFR, ne permet pas aux entreprises de se développer.
Les parents, qui sont aujourd’hui plus conscients de la conjoncture, peuvent créer une épargne investissement auprès de leurs banques. Fiscalement, le capital épargné est déductible du bénéfice imposable avec un plafond de 20 000 TND par an. Les intérêts produits sont exonérés d’impôt dans la limite de 2 000 TND par an. Tout montant épargné dans un compte épargne pour l’investissement, y compris les intérêts produits, doit être utilisé au plus tard le 31 décembre de l’année qui suit la cinquième année de l’année de l’épargne.
Fin août 2021, l’encours de ces comptes d’investissement n’a pas dépassé 31,767 MTND auprès de tout le système bancaire, soit la catégorie d’épargne la plus faible. Encore plus intrigant : elle a significativement reculé depuis le début de l’année. Fin 2020, elle était de 39,614 MTND et la chute était observée au mois de mars 2021 durant lequel elle a fondu de 10,827 MTND. Depuis, il y a une tendance haussière vers sa reconstitution.
Quelles seraient les raisons de cette baisse ? L’utilisation de cette épargne à des fins autres que l’investissement est coûteuse car elle doit être précédée de la régularisation de la situation vis-à-vis de l’administration fiscale. L’hypothèse d’un retrait est donc à éliminer. Qu’elle soit employée pour être mise dans de nouvelles entreprises s’avère aussi peu probable car il n’y a pas eu de dynamique particulière de création de nouvelles sociétés cette année.
Cette diminution brusque reste un point d’interrogation, bien que, selon nos estimations, l’explication la plus plausible n’est autre qu’un mix entre les deux possibilités évoquées. Quel qu’il en soit, il faut avouer que cette épargne est rarement constituée et reste un luxe pour ceux qui ont épuisé toutes les autres pistes d’optimisation fiscale.
Pour la relancer, il faut penser à donner de nouveaux avantages fiscaux aux particuliers. Cela pourrait même contribuer aux changements des mentalités car si une personne dispose de moyens, l’idée de se lancer dans l’entrepreneuriat pourrait devenir une piste sérieuse. Les banques doivent également encourager plus ce produit qui ne bénéficie pas du même rayonnement que d’autres types d’épargne. La promotion de l’investissement est une responsabilité collective et les plus petits détails pèsent dans l’équation.