En pleine pandémie, la Tunisie s’est offert une nouvelle dégradation de sa note souveraine (B – avec des perspectives négatives), cette fois par Fitch Ratings. Au-delà des analyses qui accusent les différentes équipes gouvernementales de mauvaise gestion, une question fondamentale est à poser : quel est le risque pour les entreprises privées en cas du scénario noir de restructuration de la dette ?
Les implications sont claires. Avec un plan d’ajustement structurel, l’Etat va réduire ses interventions, n’investira plus et, surtout, risque de ne pas payer ses créanciers internes. Des secteurs, comme le BTP, seront de nouveaux secoués.
Les financements aux entreprises seront moins accessibles. La conséquence la plus grave concernera les banques. Si ces dernières se retrouvent obligées de constituer des provisions supplémentaires pour couvrir leur exposition aux titres de l’Etat et aux entreprises publiques, c’est que les bénéfices, voire même les fonds propres de certains établissements, vont fondre. Selon le dernier rapport de S&P, les banques tunisiennes sont exposées à hauteur de 15% de leurs actifs aux BTA/BTCT, avec bien évidemment un plus grand risque pour les établissements publics. Nous pensons que même dans un cas extrême, les banques auront le soutien nécessaire pour se recapitaliser et d’éviter le déclenchement d’un risque systémique. La restructuration du secteur bancaire constituera un chapitre dans tout plan de sortie de la crise. Entre temps, les défauts de paiement corporate vont se multiplier. Les entreprises feront face à la hausse des coûts de production, aux pressions sociales et au manque de trésorerie. L’accès aux crédits sera quasiment verrouillé sauf si les bailleurs de fonds internationaux mettent en place avec le gouvernement des lignes spécifiques au financement des entreprises.
Autre conséquence : le risque de change. Le dinar ne résistera pas devant une telle situation et va reculer significativement devant toutes les devises. Pour les entreprises qui importent les matières premières, c’est une catastrophe car imputer ces hausses sur les prix de vente ne sera pas une simple tâche. Cela sans compter les procédures des importations qui seront plus longues et plus coûteuses à cause du risque pays.
Parmi les quelques points positifs, il y a l’amélioration de la compétitivité par les coûts, même si le climat social pourra l’éradiquer. Il y a également l’ouverture de tous les secteurs dans lesquels l’Etat détient le monopole à la concurrence. C’est une conséquence à moyen et long terme, ce qui ouvre la voie devant une économie plus concurrentielle et capable de générer de la croissance.
Durant ces mois, les entreprises doivent mettre en place des plans d’actions à exécuter en cas d’un tel scénario. Il faut se doter d’un maximum de flexibilité dans tous les axes de gestion pour que l’entité reste en vie. Les grands managers sont nés dans de telles crises.