En marge du Citi Media Summit, qui a commencé aujourd’hui sous le thème “Finance, Innovation and the Economy in a changing world”, Ebru Packan, Directrice régionale des marchés émergents en Europe, en Afrique et au Moyen Orient a considéré que “le cadre réglementaire de la digitalisation en Tunisie peut être intéressant pour les multinationales dans des secteurs comme le commerce de détail et santé. Les facteurs en faveur d’un changement du modèle de la consommation et de la distribution sont là”.
Et d’ajouter: “Maintenant, c’est aux entreprises de définir les meilleures stratégies pour approcher leurs clients afin de les inciter à consommer plus via les sites du e-commerce. La Citi est disponible pour les accompagner en termes de solutions et de services. Ce cadre réglementaire est également important pour l’agenda ESG de la Tunisie car la mise en place d’une stratégie globale nécessite de la data précise et fiable, et même en temps réel que seul le cadre juridique de la digitalisation est capable d’offrir”.
Afin d’approfondir l’analyse, Le Manager a profité de la présence de Ramz Hamzaoui, Directeur Régional de Citibank pour les pays du Maghreb, pour parler plus de la vision d’une banque de la taille de la Citi pour la Tunisie.
La Tunisie traverse une période difficile sur tous les plans, notamment macroéconomique. Le pays a des difficultés pour financer sa reprise. Quelle est la perception de la situation actuelle par la Citi ?
La Citi est une banque présente en Tunisie depuis 43 ans. Elle était et elle continue à être engagée envers le pays, surtout dans une période marquée par la multiplication des défis. La situation épidémiologique reste tendue, accentuant les pressions sur des finances publiques fragiles avec le cumul de déficits, le poids des salaires dans le budget et les déséquilibres des entreprises publiques.
Nous regardons les négociations avec le FMI avec espoir car elles expriment la volonté des deux parties à parvenir à un accord qui apportera de nouvelles réformes pour le pays. Cela permettra de ramener les investisseurs étrangers et de financer la sortie de la crise.
Pour la Citi, nos clients restent fidèles à leur présence en Tunisie, beaucoup sont présents pour des fins d’exportation. Il ne faut pas oublier que la pandémie a poussé à des réflexions profondes sur les chaînes d’approvisionnement mondiales et il y a une volonté de réduire la dépendance vis-à-vis de l’Asie. Des relocalisations auront lieu et la Tunisie pourra en profiter si les conditions nécessaires sont réunies.
Un autre point favorable à la Tunisie : les fortes relations économiques et le niveau de l’intégration avec la Libye. Il y a les prémisses d’une solution politique qui va ouvrir des marchés aux entreprises tunisiennes. Le pays a tous les moyens pour réussir son positionnement en tant que plateforme d’accès aux marchés libyen et européens.
Les rapports récents des agences de notation insistent sur le niveau élevé des risques qui pèsent sur les banques tunisiennes et sur la nécessité de mettre à niveau le cadre prudentiel. Qu’en pensez-vous ?
Nous considérons que le cadre réglementaire est assez favorable et la Citi est à l’aise avec les règles en vigueur. Des efforts sont en train d’être déployés pour sa modernisation. La Banque Centrale de Tunisie est intervenue rapidement dès le début de la crise, permettant aux banques et aux entreprises de continuer leurs exploitations. Après la levée de certaines règles exceptionnelles, il y aura certainement des clients qui auront malheureusement des difficultés à honorer leurs engagements.
Nous retrouvons donc l’analyse qui a été déjà faite : si l’Etat parvient à financer sa sortie de la crise, la reprise sera plus rapide et les entreprises pourront reconstituer plus rapidement leurs trésoreries, réduisant ainsi les risques sur les banques. Ces dernières, qui ont fait des efforts considérables pour améliorer leurs fonds propres tout au long des dernières années, doivent peut-être penser soit à une consolidation par une croissance externe qui permettrait leur développement à l’international ou à une spécialisation sur des lignes de métiers spécifiques.
Quels sont les secteurs d’activité qui intéressent la Citi et qui peuvent bénéficier de ses financements ?
Nous n’excluons aucun secteur en fait. Nous avons récemment financé le secteur de la microfinance qui affiche une forte croissance et une rentabilité élevée. Nous accompagnons également nos clients globaux, qui ont une présence géographique étendue et qui ont besoin d’un réseau bancaire comme celui de la Citi dans leurs opérations quotidiennes. Certains de ces clients opèrent en Tunisie et nous les accompagnons dans la gestion du risque marché et dans le financement de l’exploitation.
Nous avons également une clientèle corporate, publique et privée. Là où il y a une volonté de s’internationaliser, nous sommes là par notre expertise et notre réseau pour aider. Même l’Etat tunisien fait partie de nos clients et nous l’avons aidé lors de ses sorties sur les marchés.
Outre que le financement par des crédits, est-ce que la Citi peut aider les entreprises tunisiennes dans le cadre d’opérations de haut de bilan ?
Du point de vue technique, certes oui. La Citi est un acteur de première classe mondiale dans l’Equity Capital Markets, les opérations M&A et les financements mezzanines. Pour les entreprises tunisiennes, c’est essentiellement une question de pouvoir atteindre la taille critique qui leur permettrait d’envisager des opérations de croissance externe à l’étranger. Nous avons accompagné une longue liste de sociétés des pays émergents dans de telles démarches, et nous restons ouverts à toute possibilité dans ce sens.