Le torchon brûle entre le ministre de l’Économie, des Finances et de l’Appui à l’Investissement, Ali Kooli, et certains députés qui lui reprochent d’avoir évoqué le sujet de la création d’une agence nationale de gestion de la dette avec l’équipe qui a accompagné Jean Castex. Cela a été interprété comme une grave atteinte à la souveraineté du pays.
En réalité, c’est un faux problème. L’intention de créer une telle structure remonte à 2016 sous le nom de Tunisie Trésor. Elle fait même partie des réformes que le pays s’est engagé à effectuer lors du dernier prêt contracté auprès du FMI. L’appui technique d’institutions internationales est nécessaire, comme celui de la Banque de France et l’Agence France Trésor.
Cette agence aura le rôle de regrouper la gestion de tous les types de dette (multilatérale, bilatérale et auprès des marchés financiers) et de gérer les importantes garanties de l’État accordées aux entreprises publiques. Parmi ses missions, l’agence devra analyser les risques budgétaires et gérer le calendrier des émissions en toute transparence. Cela permettra d’approfondir davantage le marché domestique avec une publication par avance du calendrier des adjudications de titres publics. L’objectif ultime est de pourvoir les besoins de liquidité de l’État de sorte à qu’il ne se trouve jamais à court d’argent.
Tout ce travail doit être effectué en étroite collaboration avec le ministère des Finances et la Banque Centrale. La relation entre cette dernière et l’agence est claire. L’ensemble des flux financiers de l’État sont centralisés en temps réel sur un compte unique ouvert à la Banque Centrale, et dont la gestion sera assurée par l’agence. La BCT offrira ainsi une vision centralisée et actualisée du compte du Trésor, lui permettant de planifier les prévisions des dépenses. Par ailleurs, l’agence devra recourir aux services de la BCT pour l’organisation pratique d’adjudications de BTA/BTCT ainsi que le contrôle du processus de règlement-livraison des titres adjugés. Elle sera également le vis-à-vis des marchés internationaux.
Une centralisation de la dette aura comme avantage d’octroyer une marge aux gestionnaires qui pourraient ainsi la reprofiler. Au regard de la maturité de la dette souveraine tunisienne et de ses niveaux de coûts, il y a des possibilités d’alléger son coût et d’alléger les pressions sur le Budget.
Dans tout cela, où est le mal de coopérer avec des institutions internationales sur un tel sujet ? Interpréter un tel axe de coopération comme une seconde commission financière internationale n’a aucun sens. Ce qui va se passer n’est autre qu’un transfert de connaissances au profit de nos cadres qui, même s’ils ont les connaissances théoriques nécessaires, ont besoin d’un accompagnement pour mener les premières opérations de gestion. Encore une fois, les politiciens confirment qu’ils sont encore très loin du fonctionnement des marchés.