Dès la fin des années 90, peu après avoir accédé pour la deuxième fois de son histoire à l’indépendance, les Estoniens ont en effet décidé de miser fortement sur les technologies. Près de vingt ans plus tard, l’Estonie est devenue un cas d’école. Aujourd’hui, toutes les démarches administratives effectuées par les 1,3 million d’habitants sont dématérialisées.
À vrai dire, l’Estonie n’est pas le seul pays à songer à numériser son administration. La Tunisie a mis en place, elle aussi, toute une stratégie pour atteindre l’administration “zéro papier” dès … 2016.
Pas besoin de vous informer que cet “objectif” n’a pas été réalisé. Cinq ans plus tard, notre administration reste loin d’être qualifiée de zéro papier. Loin de là. Pourquoi ? Un rapport rendu public aujourd’hui par l’Institut Tunisien de la Compétitivité et des Études Quantitatives, ou l’ITCEQ, propose des éléments de réponse … et quelques recommandations.
Ce rapport se base sur les indicateurs de performance relatifs à l’activité en ligne de l’administration tunisienne proposés par l’orientation stratégique de l’e-Gov. Ainsi, le rapport indique que les indicateurs en relation avec les services en ligne et e-Participation demeurent en deçà des objectifs fixés pour 2020.
Au niveau mondial, et selon The Network Readiness Index, la Tunisie a enregistré un déclin au niveau de son rang passant de la 81ème place à la 84ème place et reste bien en deçà de l’objectif ciblé pour 2020, soit 40ème mondialement. Au niveau des pays arabes, la Tunisie est également loin de son objectif puisqu’elle se retrouve classée 8ème en 2019 contre 3ème pour l’objectif fixé pour 2020. Néanmoins, au niveau africain, le pays a amélioré son classement et est passé de 6ème en 2015 à 3ème en 2019 devançant le Rwanda, le Maroc et les Seychelles mais reste encore derrière l’île Maurice et l’Afrique du Sud. La Tunisie s’approche, donc, à grands pas vers son objectif de premier rang sur l’Afrique.
Bien que l’e-Gov en Tunisie connaisse un important progrès d’une année à l’autre, un effort additionnel devrait être déployé pour optimiser le développement des services en ligne. La Tunisie a bien entamé sa phase digitale mais reste loin encore de la digitalisation complète où les services sont simples, homogènes, transparents et complètement dématérialisés. Dans ce cadre, les auteurs du rapport ont présenté quelques recommandations.
D’abord, il faut adapter davantage le modèle actuel de transition digitale de l’administration tunisienne, en vue de mieux répondre aux besoins de ses usagers en termes d’inclusion sociale. Il importe notamment de renforcer le développement de l’infrastructure numérique pour diminuer les disparités régionales et garantir le même environnement digital à tous les citoyens. Autre point important: promouvoir la culture digitale au sein de la population avec un effort plus accentué sur l’alphabétisation numérique et digitale dans le but d’inclure la totalité des citoyens dans les divers programmes des services instaurés.
Les auteurs du rapport recommandent également de s’aligner sur les recommandations de l’OCDE concernant la proximité de l’autorité du Digital Gov du centre du gouvernement, et ce, pour plus de visibilité et de support politique au niveau de tous les secteurs quant à l’implémentation du gouvernement digital. – Appuyer la synergie entre les différentes instances gouvernementales quant à l’exécution, le suivi et l’évaluation des divers programmes et actions en relation avec l’e-Gov.
Renforcer le travail collaboratif est une autre recommandation. Elle consiste à inciter les autorités à coordonner les tâches selon une démarche intégrée et participative regroupant les diverses parties prenantes (le gouvernement, les usagers, les professionnels et la société civile).
Les autorités sont également appelées à soutenir la transformation digitale au sein des institutions gouvernementales moyennant des actions de formation et renforcement des compétences quant à l’exploitation des plateformes digitales (Tuneps, ADEB…) et à faire évoluer la perception de l’utilisation des TIC au niveau de l’administration de la fonction support à la fonction stratégique.