A l’exception de la SIPHAT, toutes les sociétés cotées qui réalisent un chiffre d’affaires en devises ont publié leurs chiffres 2019. Avec une demande interne fébrile, les marchés extérieurs représentent une échappatoire pour améliorer leurs revenus et leurs marges.
Notre groupe de sociétés, au nombre de 34, a affiché des ventes exports de 1,995 MdTND, en hausse de 9,2% en rythme annuel. Le quatrième trimestre a connu une stabilité du chiffre d’affaires global à 530,502 MTND. C’est une performance notable pour une année marquée par l’appréciation du dinar et la baisse des exportations en volume d’une façon générale. La progression des exportations a décéléré tout au long de l’exercice. Après une hausse de 25% durant le premier trimestre, nous avons enregistré des avancées respectives de 3,5% et 3,9% durant les deux quarts suivants. A ce rythme, le premier trimestre 2020 serait très modeste, surtout que le dinar a résisté durant la même période en 2019.
Mais comme l’investissement et l’endettement, les exportations demeurent concentrées chez une minorité de sociétés. Les cinq premiers exportateurs (OTH, PGH, ICF, Alkimia et Euro-Cycles) se sont accaparés 72,8% des exportations totales, un peu plus que l’année dernière. Si on étend l’analyse aux dix premiers opérateurs, cette proportion passe à 86,3%.
La majorité des entreprises sont donc des exportateurs occasionnels. L’accès aux marchés étrangers reste encore compliqué pour une grande partie de notre tissu entrepreneurial. Cela n’est pas seulement dû à un manque de compétitivité, mais aux coûts liés à ces opérations qui doivent être minutieusement préparées. Il convient, de ce fait, de convaincre le client de la qualité de son produit, respecter une longue liste de conditions, obtenir des certifications, recruter des cadres pour respecter les cahiers des charges, etc. Ce sont des dépenses engagées au préalable sans être certain d’avoir un résultat positif. Face aux coûts de financement exorbitants, les entreprises se concentrent sur leurs clients existants sans aller chercher plus loin.
L’appréciation du dinar, bien qu’elle ait plusieurs aspects macroéconomiques positifs, n’est pas nécessairement bonne pour les entreprises qui exportent. Nous avons partiellement perdu l’un des facteurs clés de compétitivité. Aujourd’hui, l’entité tunisienne croule sous les charges sociales, les salaires, les dettes et la pression fiscale, faisant du coût de production l’un des plus élevés dans la région.
A cela s’ajoute un cadre géopolitique tendu qui pousse nos clients à réduire leurs carnets de commande auprès du site Tunisie. Rien ne garantit que la dégradation de la situation en Libye ne perturbe en rien le calendrier des livraisons. D’ailleurs, notre logistique reste très limitée et inflexible pour des demandes supplémentaires. Les investissements en infrastructures doivent être une priorité absolue.
Ce manque réduit, de facto, les marchés accessibles pour les entreprises. Les marchés libyen et algérien, qui étaient une occasion pour les PME de profiter des moindres exigences en matière de certification et de traçabilité, sont à l’arrêt : le premier à cause des raisons sécuritaires et le second après la décision des autorités à faire des coupes dans les importations.
Booster les exportations est donc un exercice très difficile et dépasse le seul aspect financier. Peut-être que le nouveau Gouvernement apportera, enfin, avec lui de vraies solutions pour le poumon de l’économie tunisienne.