En matière de communication financière, la Tunisie a encore du chemin à faire. Le Conseil du Marché Financier continue à privilégier une approche plutôt pédagogique en assistant les entreprises cotées à s’adapter au bon rythme des publications plutôt que de les sanctionner.
Pourtant, le gendarme de la Bourse de Tunis n’est pas très exigeant. Il n’y a pas de comptes trimestriels à publier, mais juste des indicateurs d’activité qui concernent essentiellement le chiffre d’affaires, les charges opérationnelles et les dettes. Pour une société qui a un tableau de bord, cela est censé être généré d’une manière hebdomadaire. Mais ce n’est pas le cas de plusieurs sociétés de la Cote qui ne sont pas outillées. D’ailleurs, l’une des conditions pour s’introduire en Bourse est d’avoir un département de contrôle de gestion. La grande majorité des entreprises n’en disposent pas et se contentent de signer un engagement de s’en doter une année après l’IPO. En pratique, cela n’est pas évident et peut exiger plus de temps.
Conséquence : nous sommes le 21 octobre, une journée après le délai fixé par le CMF pour la publication des indicateurs d’activité, 31 sociétés seulement ont affiché leurs chiffres. Il reste donc une bonne cinquantaine d’entreprises qui n’ont pas respecté les deadlines.
Est-ce que nous sommes loin des standards internationaux ? Avec ce qui se passe actuellement sur les plus grandes places, nous avons une grande chance de se rapprocher rapidement des meilleures pratiques. En fait, les régulateurs sont de plus en plus convaincus que publier des états financiers trimestriels n’est pas une bonne affaire car ils ne font qu’augmenter la volatilité des marchés. L’Autriche vient effectivement de lever cette obligation pour les sociétés cotées à Vienne. La Securities and Exchange Commission, le gendarme de Wall Street, a même lancé une consultation en 2019 sur l’utilité de ce rythme de communication. Plusieurs assureurs majeurs préfèrent ne plus faire de publications trimestrielles.
Ainsi, la tendance est de s’orienter vers des trading update pour les premiers et les troisièmes quarts de l’année. Donc, ce qui nous manque réellement c’est un contenu plus intéressant pour les indicateurs d’activité. Le CMF pourrait exiger davantage de données qui permettent d’avoir une meilleure idée sur le résultat. Reste le respect des délais qui ne pourrait avoir lieu que par des sanctions. Nous avons aujourd’hui des entreprises qui accusent encore du retard dans la publication des comptes de 2018. Il faut le faire car avec l’amélioration du cadre réglementaire de la Bourse de Tunis et les changements attendus dans la Loi 94-117, une plus grande transparence pourrait préparer le terrain à un rôle plus important pour le marché financier dans le financement de l’économie nationale.