Parmi les principaux traits de l’année boursière 2019, nous trouvons le nombre de changements au niveau du top management d’un bon nombre de sociétés cotées. La liste est longue : l’ATB (Ahmed Rejiba après le départ à la retraite de Férid Ben Tanfous), Attijari Bank (Saïd SEBTI à la place de Hichem Seffa), STB (Lotfi Dabbabi à la place de Samir Saied), Cellcom (Amine Chouaieb à la place de Mohamed Ben Rhouma), Les Ciments de Bizerte (Chedly Saidani à la place de Jalel Ben Othman), SOTUMAG (Faten Bel Hedi en remplacement de Fathi Fadhli), SERVICOM (Mourad Dimassi en remplacement de Majdi Zarkouna) et PGH (Moez Lidinellah Mokaddem en remplacement de feu Abdelwaheb Ben Ayed). Cela sans oublier qu’il y aura également du changement à la tête de la BH. Ainsi, nous sommes certains d’avoir neuf nouveaux directeurs généraux pour cette année. Le changement aurait donc touché plus de 10% du top management des sociétés de la cote de Bourse de Tunis. Un rythme digne d’une grande place financière.
Tous ces changements n’ont pas été le résultat de mauvaises performances ou de pressions de la part des actionnaires lors des Assemblées Générales. Loin de cela. Il y a deux départs à la retraite comme c’est le cas des dirigeants de la STB et de l’ATB, ou des décisions de l’actionnaire majoritaire dans le cas des entreprises publiques. Mais dans tous les cas, il y a un point commun : aucune nomination ne découle d’un processus de succession préparé depuis des années au sein de chaque entreprise.
Les Conseils d’administration font donc appel au marché des dirigeants. Ce marché, qui n’existait réellement pas quelques années auparavant, va certainement se développer davantage, améliorant de la sorte la gouvernance des entreprises en Tunisie. Le fait de sentir qu’il y a des candidats qui peuvent le remplacer à tout moment met de la pression sur le dirigeant qui cherchera à améliorer les performances de l’entité dont il a les rênes. Avec les droits que les actionnaires viennent d’avoir dans le cadre de la loi d’amélioration du climat des affaires, l’étau se resserre plus que jamais sur les managers tunisiens.
Ce danger pousserait, à notre avis, les dirigeants à tisser des stratégies pour se protéger. Primo, il y aurait des clauses d’indemnisations importantes dans les contrats, ce qu’on appelle des parachutes dorés. Ainsi, le licenciement d’un manager coûterait cher aux actionnaires qui pourraient renoncer à une telle décision. Secundo, les dirigeants mettraient en place des plans de succession. Choisir lui-même son successeur potentiel et le former, donc indirectement le mettre sous son giron, est beaucoup mieux que de se retrouver face à un remplaçant qui pourrait tenter d’effacer son historique. C’est la magie de la gouvernance, un mécanisme créé un autre.
Bassem Ennaifar