Une étude intitulée Pour une migration professionnelle efficiente a été élaborée par L’Économiste Maghrébin et le Cabinet ADVI pour le compte de la Fondation Friedrich Naumann pour la liberté. Elle expose tout un plan détaillé qui cible la formation professionnelle, la profession de l’ingénierie et l’enseignement universitaire. Les recommandations de l’étude ont porté sur trois secteurs qui ont été fortement touchés par la fuite des cerveaux: la médecine, l’ingénierie et l’enseignement supérieur. Détails.
Le but de cette étude, selon ces auteurs, et de présenter des recommandations qui peuvent servir d’inputs pour les décideurs publics. Elle focalise sur la fuite des cerveaux, notamment de la migration des diplômés hautement qualifiés, les ingénieurs, les médecins et les enseignants universitaires. Elle met aussi les feux des projecteurs sur la migration de ceux issus de la formation professionnelle ou les études supérieures courtes: le personnel de la mécanique et des travaux de soudure et les ouvriers agricoles.
Bien que le phénomène migratoire de date pas d’hier, il est important de relever un changement notoire dans la dynamique migratoire tunisienne, et notamment vers les pays du Nord, et ce, depuis les années quatre-vingt. Ce développement est le résultat du changement des politiques migratoires avec les pays du Sud mais également au vu du nouveau phénomène en lien avec les difficultés de l’insertion professionnelle des diplômés de l’enseignement supérieur, note les auteurs de l’étude.
Bien qu’à chaque secteur ses réalités qui poussent ces ressortissants à s’expatrier, l’étude ont pu dégager un ensemble de motifs communs. Il s’agit principalement du contexte politique, social et culturel dégradé, des nationalités étrangères très convoitées, de la détérioration des fondamentaux économiques, l’absence de visibilité et l’incapacité de se projeter dans le futur, de l’intolérance, rejet de la différence, …
La glissade du dinar et la perte de confiance dans le système éducatif sont aussi parmi ce “socle commun” des motifs.
Redorer le secteur de la santé
Pour le secteur de la santé, l’étude recommande la mise en place de mesures de répression efficaces contre les actes de violence qui se sont multipliés ces dernières années. Par ailleurs, pour garantir une meilleure motivation du personnel médical et paramédical, les augmentations de salaires sont de mise. De même, l’étude recommande la révision de la dernière réforme de la santé publique.
En effet, l’absence de mobilité est un véritable obstacle pour les médecins. Si certains médecins (internes, résidents et/ou étudiants) refusent de travailler dans les régions, c’est à cause du problème du manque d’équipement médical et du manque d’expertise. Ainsi, les principaux problèmes des médecins sont : le manque de matériel; la surcharge de travail pour les juniors ce qui crée un sentiment d’injustice; les problèmes de sécurité et l’absence d’un système de motivation et de sanction.
De la nécessité de valoriser les ingénieurs
Faut-il encore rappeler que les ingénieurs tunisiens sont sollicités par les entreprises européennes voire américaines ? Face à l’engouement des ingénieurs tunisiens pour le départ massif à l’étranger, l’étude recommande quelques mesures à prendre. Tout d’abord, le développement des filières stratégiques telle que l’informatique. Puis l’amélioration des conditions salariales en valorisant le traitement des ingénieurs dans les établissements publics.
Comment retenir les enseignants universitaires ?
L’étude recommande l’amélioration de la situation de l’enseignant universitaire. Cela est possible à travers, l’octroi des avantages permettant la valorisation du métier d’enseignant-chercheur et la mise en place d’un système d’évaluation juste qui se base sur la production scientifique.
Le secteur privé, la société civile et les citoyens doivent agir de leur côté. Le secteur privé doit renforcer son rôle en matière de responsabilité sociétale de l’entreprise et de formation. Il devrait mettre en place des politiques de rémunération valorisante. Pour garantir un meilleur épanouissement des employeurs, il doit améliorer l’environnement du travail. De son côté la société civile doit œuvrer pour la diffusion des valeurs de tolérance, et non de violence, de respect des personnes et des biens publics, ce qui est fondamentale.
Quelle réforme pour la formation professionnelle ?
L’Etat doit agir au niveau institutionnel. L’étude recommande de :
- Intégrer la migration comme un déterminant prévalant dans le choix d’accéder à la formation professionnelle et qui devrait, par conséquent, être un paramètre de détermination du niveau du remplissage des spécialités demandées;
- Renforcer et cibler la communication et la sensibilisation sur les atouts de la formation professionnelle, en y intégrant les relations et initiatives personnelles qui animent les relations avec les entreprises tunisiennes ou les recruteurs à l’international pour faire des expériences acquises une stratégie globale et cohérente;
- Instaurer une meilleure gestion des dispositifs et avantages de la politique active de l’emploi et des incitations offertes dans ce domaine en faveur de la formation pour l’insertion;
- Par ailleurs, l’étude met en valeur la nécessité d’amorcer des dialogues régionaux et surtout sectoriels transversaux sur l’arbitrage entre satisfaction du tissu économique tunisien et le placement à l’international, afin d’amorcer une vraie lecture et dialogue régionaux sur ce potentiel.
Les titulaires de diplôme de formation professionnelle sont souvent pessimistes quant aux conditions favorables du marché du travail tunisien. Par ailleurs, la dévalorisation de tels métiers par la société tunisienne incite les jeunes à les quitter.