Par Ahmed Saoudi
Il est un fait avéré que la séance unique entrave la productivité d’une administration déjà au rendement largement critiqué. Deux mois durant, le nombre d’heures de travail plongent de 40 heures par semaine à seulement 30.5 ― ce qui équivaut à une baisse d’environ 24%.
Instaurée au début des années 60, la séance unique pouvait avoir une raison d’être à l’époque. Mais, ce n’est plus le cas aujourd’hui avec la climatisation artificielle. Et pourtant, elle persiste. Même dans les pays du Golfe, où les températures peuvent atteindre 45°C, seuls les travaux de bâtiment, qui doivent s’arrêter durant les heures les plus chaudes de la journée, bénéficient d’horaires spéciaux durant la saison estivale.
Bien que la séance unique ne fasse pas l’unanimité dans le secteur privé, celui-ci est fortement touché par ses effets. Les entreprises se trouvent obligées de régler toutes leurs procédures administratives durant un laps de temps assez court. “La séance unique nous lèse énormément”, s’indigne Imed Kadri, directeur comptable et financier à Sopra HR. “Nous sommes dans l’obligation de régler toutes nos procédures administratives avant midi. Car même si les administrations travaillent théoriquement jusqu’à 14h, la réalité est tout autre”, ajoute-t-il.
Le problème n’aurait-il pas pu être résolu grâce la digitalisation ? Avec la possibilité de régler ses affaires à distance, les effets de la séance unique sur notre économie auraient pu être amortis considérablement.
Et il n’y a pas que le nombre d’heures qui dérange ! Les usagers des services de l’administration se plaignent aussi d’une dégradation de la qualité des prestations. Et pour cause : les fonctionnaires sont sous pression à cause de la compression des horaires de travail tout en ayant la même charge. Sans oublier bien évidemment les effets des soirées tardives, qui marquent la saison estivale en Tunisie, sur les capacités cognitives des employés.
Réduire le nombre des séances de travail impacte également l’activité des entreprises et oblige plus d’une à revoir leur mode de fonctionnement durant ces deux mois. Pour certaines, c’est l’occasion d’accroître leur chiffre d’affaires, comme dans le secteur touristique. Pour d’autres, en revanche, l’activité est mise en veilleuse.
C’est le cas par exemple de l’agence événementielle AZ.COM. Cette dernière suspend, purement et simplement, toute activité d’organisation de salons professionnels pendant la période estivale. “Travailler en deux séances permet aux visiteurs de consacrer une partie de leur journée à visiter un salon ou assister à une conférence”, nous explique Riadh Azaiez, fondateur et directeur général d’AZ.COM. “Cet arrangement n’est plus possible en période de séance unique. Les gens préfèrent réserver l’après-midi à d’autres loisirs!”
Outre les aménagements horaires estivaux, les heures de travail dans les administrations tunisiennes connaissent à leur tour une réduction pendant le mois de Ramadan. Une mesure qu’on trouve également dans la plupart des pays musulmans qui revoient à la baisse, généralement de deux heures, les horaires des établissements publics. Le Qatar va encore plus loin avec une réduction de 3 heures par jour !
En revanche, la Malaisie et la Turquie, deux pays à majorité musulmane, n’observent aucun changement d’horaire durant le mois du jeûne. À quand la Tunisie ?