Édito de Sahar Mechri
Article paru dans le numéro 226 (janvier 2017) du magazine Le Manager.
Date : 29 et 30 novembre. Lieu : le Palais des Congrès sur les Berges du lac. Le décor est déjà planté.
Deux jours durant , la Tunisie a revêtu ses plus beaux habits. Ses amis, en grand nombre, étaient au rendez-vous pour la soutenir et l’aider à sortir de l’ornière. La Conférence sur l’investissement a placé la Tunisie sous les projecteurs du monde entier, mobilisant l’engagement de tous, le gouvernement en premier, la diaspora qui a joué un rôle considérable de relais mettant à contribution son carnet d’adresses et ses inestimables réseaux. Le secteur privé et les partenaires sociaux prirent sur eux, par sursaut patriotique, de calmer les tensions sociales. Tous étaient habités par le challenge de réussir l’événement.
https://lemanager.tn/comment-remettre-les-pendules-de-linvestissement-%C3%A0-l-heure-9f1372572c03
La conférence a débuté de la meilleure manière : l’Emir du Qatar, Tamim Ibn Hamad Al-Thani et Manuel Valls ont placé le curseur à son plus haut niveau entre engagements et promesses. Les banques et les fonds n’étaient pas en reste — voir notre interview avec Ulrich H. Berunhuber représentant diplomatique de la BEI. Signe de soutien et de confiance à la Tunisie.
Nous avons envoyé le message qu’une fois la transition démocratique réussie, nous aurions placé l’urgence économique en pole position de nos priorités. Les médias étrangers en parlaient, cela nous changeait des discours rodés depuis cinq ans.
mais ceci est dans l’ordre naturel des choses, la conférence avait pour vocation de susciter leur intérêt. Ils ont besoin d’un temps d’observation pour être rassurés et convaincus. Inutile de préciser alors que désormais nous sommes sous la loupe des fonds d’investissement et des investisseurs.
Fort heureusement, l’arrivée de grandes enseignes telles que GE Healthcare, Peugeot, Airbus ou le bureau régional de la BAD a développé un branding d’une Tunisie “business-friendly” comme l’a dit Mohamed Bridaa, DG de Microsoft Tunisie (dans notre article sur les faits marquants de 2016).
Cela vaut plus que les meilleures campagnes de communication.
Reste maintenant la lourde tâche de concrétiser ces engagements : le gouvernement doit faire preuve de proactivité montrant une capacité d’exécution dans des délais appropriés, conformes aux attentes des partenaires étrangers. Nous avons présenté ces engagements dans notre dossier donnant la parole aux experts, aux diplomates et aux partenaires étrangers pour s’exprimer sur l’après-conférence.
“Il faudrait que la Tunisie protège jalousement sa compétitivité, il y a certains signaux préoccupants”, Mohamed El Kettani sait de quoi il parle lors de la conférence plénière.
Hélas, il n’a pas été démenti par les faits.
Quelques jours après cette euphorie, nous apprenions la fermeture de Petrofac, une affaire que nous croyions réglée. A laquelle vient s’ajouter le triste épisode de l’assassinat de Sfax entaché de soupçons d’intervention de services de renseignements étrangers. Deux faits qui ravivent la plaie sécuritaire, notre véritable talon d’Achille.
Autant nous avons plaidé dans ces colonnes pour que l’Etat se désengage du rôle de gestionnaire, autant nous l’appelons à renforcer son rôle régalien. La sécurité de Tous en dépend avant même d’évoquer les radars des investisseurs étrangers.
Fait encore plus troublant, l’assaillant de Berlin nous fait penser que durant les dernières années nous avons laissé se développer des torpilles latentes qui peuvent exploser ici ou ailleurs à tout moment pour mettre en danger nos vies, abîmer notre image et démolir notre économie.
Le gouvernement actuel joue de malchance, à l’heure où il s’attelle à concrétiser, à convaincre les investisseurs, les institutions internationales et à rehausser l’image du pays, des forces obscures, de l’ombre gangrènent le processus au mépris de nos idéaux de liberté, de progrès et de modernité. On aurait tant voulu que 2016 finisse en beauté, malheureusement on a été rattrapé par le laxisme sécuritaire des années précédentes.
C’est comme si on tombait dans une vision manichéenne car en face, il y a des acteurs qui se battent tous les jours pour survivre dans des marchés de plus en plus difficiles, prétendant même d’occuper les premiers rangs. Faute d’engager des actions déterminantes et immédiates, nos entreprises ne pourront plus à terme réaliser des performances.
Notre invité Slim Ben Ammar, DG de Sodexo Tunisie, s’est vu attribuer le titre de «Best Employer» grâce à toute une politique d’engagement et de management participatif. Nous donnerons la parole également à Souheil Ben Salem, DG d’EO Datacenter, qui vient de nouer un partenariat avec une multinationale française.
Nous parlerons aussi de la société Sic med qui a conclu un accord avec la société française Beewair pour produire et développer des purificateurs d’air lors des Journées économiques tuniso-françaises organisées par la CONECT. Grâce à ces lueurs d’espoirs et à tous ceux qui œuvrent pour créer des emplois hautement valorisants et de la valeur, nous pouvons espérer que 2017 sera de bon augure !
Bonne lecture et Bonne Année à tous.