Édito de Sahar Mechri
Article paru dans le numéro 225 (décembre 2016) du magazine Le Manager.
Pas plus qu’une année déjà, le mot PPP résonnait partout ! Le projet de lois du partenariat public privé avait enfin reçu l’onction de l’hémicycle de l’ARP. Le sujet avait suscité un énorme intérêt de la part des décideurs, de la société civile et des médias.
Rendre opérationnel ce projet de loi serait d’un grand intérêt pour la réalisation des quatre vingt projets préparés pour Tunisia 2020. Le PPP est une voie royale pour introduire l’innovation, rationaliser les coûts et mieux respecter les délais. Il peut s’ériger en une formule appropriée pour des investisseurs locaux et étrangers, telle est d’ailleurs sa vocation.
Quelques chiffres de la Conférence internationale #Tunisia2020
Publiée par Le Manager sur Mardi 29 novembre 2016
Néanmoins, il n’y pas eu de concrétisation de projets depuis l’adoption en fanfare. L’investissement étranger est resté sur sa faim et l’investissement intérieur est en situation d’attente. Manque d’initiatives ? Pas réellement ! Bien de nos capitaines d’industries tunisiennes sont aptes à mener des projets qui scellent l’ancrage public-privé. Notre invité du Manager, Ahmed Bouzguenda en fait partie. Il est de ceux qui ont toute une histoire dans le bâtiment et la maitrise d’ouvrage. Président de l’IACE, il nous livrera sa perception du monde des affaires et les grands chantiers de l’IACE.
En plus des projets à réaliser en mode PPP, plusieurs investisseurs ont exprimé leur intérêt pour l’acquisition d’entreprises publiques. Néanmoins, le mot « privatisation » est devenu tabou à cause des tensions sociales. Il existe certes des méfaits contre lesquels il faut mettre en place les garde fous nécessaires (transparence et bonne gouvernance) mais il convient, en cette période de jubilé de l’investissement, de rappeler les bénéfices qu’on peut en escompter. Outre les revenus des cessions de nature à rafraîchir le budget, ou tout au moins à freiner la progression de l’endettement public, la privatisation est un remède contre les défaillances de la gestion publique.
A dire vrai, en dépit de toute bonne volonté, la tutelle publique n’a pas les moyens de fournir des objectifs clairs et précis à ses gestionnaires. A ce propos, la théorie d’Holmström, prix Nobel fraîchement proclamé cette année nous enseigne que l’Etat n’a pas les moyens de juger efficacement si le manager a fourni les efforts nécessaires pour l’accomplissement de ses obligations. Une structure incitative où les deux intérêts seraient alignés est de ce fait nécessaire. La situation est encore plus préoccupante en Tunisie, la présence de l’Etat dans certains secteurs concurrentiels tels que l’agriculture, les cimenteries, les médias est de nature à favoriser les distorsions et à réduire le bien- être collectif. Dans d’autres secteurs, d’essence concurrentielle tels que les telco, les banques ou l’audiovisuel, l’Etat est actionnaire dans plusieurs opérateurs en compétition les uns contre les autres. Il siège ainsi dans différents conseils d’administration. Quand bien même les motifs seraient exceptionnels, six ans après, c’est le provisoire qui dure.
Les investisseurs étrangers sont indubitablement sensibles aux avancées démocratique et politique de la Tunisie mais ils ont également l’œil fixé sur l’environnement des affaires. Tourner le dos à la privatisation comme pour exorciser les démons du marché et préserver des emplois non productifs n’a guère solutionné les problèmes, sinon on l’aurait su. Le remède n’est pas pire que le mal !
Inciter les entreprises à des comportements responsables et citoyens, imposer des audits de responsabilité sociétale et environnementale, taxer les entreprises qui y dérogent est une solution pour constituer un tissu d’entreprises avec un fort ancrage social, pour créer des emplois pérennes et ne pas se voiler la face à travers des emplois non productifs. La Bourse de Tunis a organisé un séminaire en la matière, vous pourrez lire dans nos colonnes le compte rendu. De son côté, la Conect multiplie les efforts en la matière et appelle à un label RSE depuis déjà des années.
Il existe d’autres voies pour la pérennisation des emplois et l’amélioration de la productivité de nos entreprises privées et publiques. La veille au développement et à l’épanouissement du capital humain au sein des entreprises en est une. Vous trouverez également dans ce numéro les 10 tendances RH de 2016 élaborées par le cabinet Deloitte.
Parce que nous militons pour la libre initiative et la création de valeur là où elle se trouve, notre dossier présentera une alternative de financement pour les jeunes entrepreneurs ou pour les associations engagés dans le social, à savoir le crowdfunding. D’éminents experts internationaux et dirigeants de plateformes étrangères invités par la CONECT lors du 1er forum sur le crowdfunding vous livreront leur témoignage. Edifiant !
Bonne lecture !