Hazem Ben-Gacem, commissaire général de la Conférence Internationale Tunisia 2020
Il est aujourd’hui président de la société de haute couture italienne Corneliani et de la société de luxe danoise Georg Jensen, membre du CA de la société italienne d’équipements sportifs Dainese, la société suédoise POC spécialisée dans les casques de ski, la société new-yorkaise de technologie KGB ainsi que la société de solutions d’anti-contrefaçon Opsec Security Inc basée en Pennsylvanie. Lui, c’est Hazem Ben-Gacem, son parcours, ses faits d’armes font pâlir d’envie les plus chevronnés des chefs d’entreprise. Une large palette d’activités, à l’image d’une tête bien pleine mais surtout bien faite.
Fraîchement nommé co-commissaire par le ministre du développement, de l’investissement et de la Coopération internationale, Hazem Ben-Gacem quadragénaire, premier Tunisien ayant intégré Harvard, est aujourd’hui conseiller au sein du comité de Harvard Kennedy School of Government. Il avait commencé sa carrière à New York dans l’équipe de fusions et acquisitions de la banque d’affaires Crédit Suisse, avant de s’établir à Londres et de rejoindre Investcorp, une banque d’affaires de renom. Le Manager l’a contacté pour évoquer avec lui la conférence internationale sur l’investissement mais également son métier, le private equity.
Présidant actuellement l’activité de capital investissement européen chez Investcorp, Hazem Ben-Gacem côtoie le monde du private equity depuis 25 ans. A vrai dire, Investcorp est engagé beaucoup plus dans les secteurs de la consommation de détail et de la technologie. « Je passe à peu près une semaine par mois aux Etats-Unis, le berceau des startups technologiques. Comme tout dans la vie, certaines marchent très bien, d’autres moins. J’aime penser que dans ces deux secteurs, nous sommes de ceux qui ont le plus réussi en Europe », a-t-il souligné. Interrogé sur les éléments du business sur lesquels ils sont le plus regardants, il a précisé qu’il n’y a vraiment pas de checklist dans le private equity. D’abord, il faudrait que le marché soit prometteur (forward looking). A ce titre, les tendances macroéconomiques, le comportement des consommateurs, les tendances réglementaires sont minutieusement examinées pour déterminer si le marché est attractif. Ensuite, il a affirmé qu’il y a lieu de considérer la pertinence du business dans lequel ils comptent investir, c’est-à-dire s’il y a plusieurs très grands acteurs. Finalement il a insisté sur l’importance de l’équipe managériale, de leur vision et de leurs capacités. Hazem Ben-Gacema signalé qu’ils interviennent moins en capital investissement et plus en conseil stratégique. Questionné si la stratégie du fonds était d’investir principalement sur les pays développés, il a rétorqué que leur équipe basée à Bahrein investit principalement dans les pays du Golfe et en Turquie. Peut-être un jour en Tunisie ! Ben-Gacem estime que l’activité du private equity monte en rythme en Tunisie. « La Tunisie est une passerelle pour beaucoup de business et de secteurs. Que ce soit Africinvest mais aussi Abraaj sont en train de réaliser des deals très intéressants. J’espère que ceci continuera », a -t-il souligné.
Point besoin de démonstration, le monde de l’investissement, notamment étranger n’a pas de secrets pour lui ni côté cour ni côté jardin. On l’aura compris, son optimisme quant aux perspectives futures du pays n’est guère de circonstance ou de façade, il procède de sa vision des choses, de son réalisme et de sa conscience du terrain et de la psychologie des investisseurs. «Pour moi, la Tunisie est à l’image d’une startup avec un énorme potentiel». Confiant de pouvoir déployer tous les efforts pour présenter la Tunisie aux investisseurs étrangers sous ses plus beaux atours, il étaye sa pensée : «Il ne s’agit pas de susciter leur sympathie ou de demander de l’aide, nous avons une bonne position géographique et beaucoup de talents », affirme-t-il. La question fondamentale pour lui est d’arriver à convaincre les investisseurs étrangers que la Tunisie est le parfait hub d’affaires dans l’air du temps. Hazem Ben-Gacema se réjouit que l’administration actuelle s’inscrive dans cette démarche et que toutes les parties prenantes s’attellent à passer ce message. De ce fait, la Tunisie pourrait constituer une passerelle pour l’Afrique du Nord, l’Afrique subsaharienne ainsi que pour l’Union européenne.
Interrogé sur les secteurs qu’il considère comme plus attractifs, Hazem Ben-Gacema affirme que la Tunisie a une longue histoire dans le secteur touristique, où nous avons appris comment faire apprécier le site aux visiteurs étrangers. « Nous espérons maintenir le même ADN et le transmettre au secteur industriel, manufacturier et accueillir chaleureusement les partenaires étrangers. C’est de l’intérêt de tous. Il faut garder à l’esprit que ces investissements potentiels créeront de l’emploi et tous les Tunisiens profiteront d’une manière ou d’une autre ». Il a ajouté que déjà la Tunisie excelle dans certains secteurs tels que le textile, les industries mécaniques et électriques et l’IT.
Loin d’être la solution magique qui résoudra tous nos problèmes, cette conférence est selon lui une étape très importante qu’il faudrait franchir pour bâtir le futur. Quand bien même, il y a lieu de se prévaloir de certaines avancées telles que le Code de l’investissement mais beaucoup reste à faire, notamment en matière réglementaire. Hazem Ben-Gacema a tout de même précisé qu’il a fallu 50 ans au Vietnam ou à Singapour pour être là où ils sont aujourd’hui.
Questionné sur la manière d’organiser le travail avec Mourad Fradi, le deuxième co-commissionnaire, il s’est dit ravi de collaborer avec lui : « He’s a fanstic guy », assure-t-il. Chez lui, rien n’est laissé au hasard, une vraie mécanique humaine réglée comme une horloge suisse. Le discours, mais aussi et surtout la méthode qui lui font souligner qu’ils se sont partagé les prérogatives. Ils se parlent tous les jours. « Le plus important est dans la coordination et nous avons une magnifique équipe impliquée et engagée ».
Ce banquier, des plus exigeants, sait aussi s’affranchir et s’émanciper de la tyrannie des chiffres. Il a à l’évidence du cœur, un cœur qui bat pour sa terre d’origine. Avec un fort accent de sincérité, il résume ainsi sa pensée : « Nous avons une petite fille qui s’appelle la Tunisie et j’espère que nous pourrons faire en sorte qu’elle ait une vie heureuse et réussie ». Il ne saurait mieux dire !